Les Otages

Contre-histoire d'un butin colonial

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Date de parution 31 août 2022 | Archivage 22 sept. 2022

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Résumé

Sur les traces d'un trésor égaré, la violence coloniale refait la surface. 

1890 : un colonel français entre dans Ségou, ville d’Afrique de l’Ouest, et s’empare d’un trésor. Parmi les objets du butin, des bijoux et un sabre. Alors que le Sénégal réclame la restitution du sabre depuis des décennies, symbole de sa mémoire collective, la France peine à répondre, prise dans un carcan idéologique et juridique. Ironie du sort : les bijoux ont, eux, été perdus, oubliés ou volés. Partie sur les traces de ce trésor, Taina Tervonen découvre une histoire coloniale violente dont les objets sont les témoins silencieux, une histoire dont nous resterons prisonniers tant qu’elle ne sera pas racontée.

Sur les traces d'un trésor égaré, la violence coloniale refait la surface. 

1890 : un colonel français entre dans Ségou, ville d’Afrique de l’Ouest, et s’empare d’un trésor. Parmi les objets du butin...


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FORMAT Grand Format
ISBN 9782381340302
PRIX 20,00 € (EUR)

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Chroniques partagées sur la page du titre

En 1890, le colonel français Archinard et son armée prennent la ville de Ségou, dans l’actuel Mali. Ils s’emparent du trésor du palais, dans lequel figurent notamment des bijoux et un sabre, qui aurait appartenu à El Hadj Oumar Tall, seigneur musulman érudit et chef de guerre, qui fonda au 19ème siècle un empire sur le territoire des actuels Sénégal, Mali, Guinée et Mauritanie. Parmi le « butin » ramené en France par Archinard se trouvent également deux enfants, dont Abdoulaye, 10 ans, petit-fils d’Oumar Tall.

A l’heure où le Sénégal et d’autres pays africains réclament la restitution des objets acquis (pour ne pas dire pillés) par les métropoles pendant la colonisation, l’auteure, journaliste et documentariste qui a passé son enfance au Sénégal, a décidé d’enquêter sur les objets volés à Ségou et en particulier sur le sabre d’Oumar Tall, désormais restitué au Sénégal par la France et exposé au Musée des Civilisations Noires de Dakar. Que sont devenus les autres objets, quel a été le sort des deux enfants enlevés à leurs racines ? Et le sabre en question est-il réellement celui d’Oumar Tall ? Exploitant toutes les archives et sources disponibles en France et au Sénégal, elle retrace peu à peu la piste des enfants et du butin, et fait émerger un pan violent et déshumanisant (mais ne le sont-ils pas tous?) et peu connu de l’histoire coloniale française. Sans se prétendre historienne, son enquête est cependant méthodique et fouillée, même si elle n’atteint pas le résultat escompté. L’auteure met le doigt sur la condescendance dont les (anciens) colonisateurs faisaient et font encore preuve à l’égard de leurs (anciens) colonisés. Ainsi, citant Felwine Sarr*: « Il y a comme une impossibilité à prendre en compte le fait qu’il existe un continent d’un milliard d’individus avec une jeunesse qui a droit à son patrimoine – exactement comme les jeunes Européens ont droit à leur patrimoine. Non, ils pensent que ce qui est à eux est à eux, et ce qui est à nous est aussi à eux ! Ils proclament l’universalité des musées, mais c’est une universalité centrée sur soi. […] Il y a toujours des arguments. ‘Il n’y a pas de musées en Afrique’ – nous en avons dénombré autour de 500. ‘A qui doit-on rendre ? A l’époque, le Sénégal ou le Bénin n’existaient pas’. Quand des objets ont été pris dans l’Empire austro-hongrois, on les a bien rendus à l’Allemagne ou à l’Autriche, même si l’empire n’existait plus. ‘Les objets n’ont pas été pris, ils ont été donnés ou vendus’. Oui, donnés ou vendus dans un rapport asymétrique de pouvoir. N’est-ce pas la même question que pour les biens spoliés juifs ? Quand des Juifs vendaient des toiles de maître pour trois fois rien afin d’échapper à la mort, on leur a quand même rendu leurs biens, à eux ou à leurs descendants. Pourquoi ces analogies ne fonctionnent-elles pas ? […] Rapidement, on se rend compte que la question ne se joue pas au niveau de la raison, mais bien ailleurs, poursuit-il. Elle se joue dans une vérité intime qui s’est construite dans le temps, à force de répétitions dans les films, dans les livres, dans les médias, dans les livres d’histoire, dans les discours politiques. Au fond, il y a toujours cette idée que l’Africain est un incapable ».

Un récit sensible et captivant et d’une lecture très fluide, qui témoigne d’une volonté d’ouvrir les esprits, avec humanité et humilité : « Je parcours les vitrines [du musée du Quai Branly], mes leçons de primaire en tête, et je vois une étranger mise en scène de l’histoire coloniale, transformée en un récit de dons, dénuée de toute trace de violence guerrière ou de domination, de toute référence à la brutalité dont ces objets sont les témoins directs. Le silence me paraît assourdissant ». « Ainsi, en 1893, il était impossible de penser que ces pièces soient africaines : trop délicates, trop fines, fabriquées avec des techniques trop sophistiquées. L’Afrique ne pouvait produire ce que les journalistes, à la vue des bijoux, qualifiaient d’ « originalité » et de « sentiment artistique ». Près de cent trente ans plus tard, leur regard me paraît schizophrène : il fallait admirer la beauté du butin de guerre, témoin de notre domination sur l’Afrique, tout en se disant que cette beauté ne pouvait provenir d’Afrique ».

*auteur en 2018, avec Bénédicte Savoy, du rapport commandé par E. Macron sur la question des restitutions

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La restitution d’objets pris de force au cours de la colonisation ou des guerres est un sujet à la mode depuis quelques années. Il va bien avec le renouvellement du discours sur la colonisation, qui parfois cherche à rendre le discours plus nuancé et complexe et parfois le simplifie au point de le rendre pire que caricatural. Alors quand j’ai découvert ce livre, qui prend le temps sur ce sujet qui m’intéresse mais pour lequel je n’ai aucune formation, et qu’en plus j’ai vu qu’il est édité par Marchialy, une maison d’édition spécialisée dans les livres de reportage au long cours que j’ai découvert plus tôt cette année (même si la maison a été fondée en 2016, je ne suis pas toujours en pointe de l’actualité) avec le très intéressant [The Good Girls : un meurtre ordinaire], je n’ai pas été longue à le solliciter sur netgalley et à me plonger dans sa lecture.
Taina Tervonen, une journaliste finlandaise qui a passé une grande partie de son enfance au Sénégal (et qui n’en est pas à son premier reportage au long cours), décide, à la suite de la restitution du sabre d’El Hadj Oumar Tall au Sénégal par la France, de mieux comprendre le cheminement de cet objet et de ceux qui l’accompagnaient et d’éclairer cette décision de restitution et le sens d’une telle décision.

Le livre commence lentement, un peu trop à mon goût, mais passé les vingt ou trente premières pages, on rentre vraiment dans le vif du sujet et cela devient vite passionnant. Parce que ce sabre et les objets qui l’accompagnent, le trésor de Ségou, ont une histoire bien emberlificotée. On découvre des personnages historiques qui sont semble-t-il connus de tous les petits élèves sénégalais mais dont, pour ma part, je n’avais jamais entendu le nom. Archinard, d’abord, ce grand pacificateur de l’Afrique de l’Ouest (et l’on sait ce que recouvre le mot pacificateur dans ce contexte…), El Hadj Oumar Tall aussi bien sûr, fondateur d’une congrégation soufie. Ces deux-là sont reliés par une confrontation qui culmine (pour l’histoire qui nous intéresse, pas du point de vue de l’histoire ou de la stratégie militaire) dans la « bataille » de Ségou (les guillemets sont de mon fait, parce qu’en matière de bataille, la ville a été évacuée et il n’y a pas eu d’affrontements…). Mais on se rend très vite compte que les dates ne vont pas : El Hadj Oumar Tall est mort en 1864 alors qu’Archinard arrive au Soudan français en 1880. Et puis les lieux non plus : on parle du trésor de Ségou, qui est aujourd’hui une ville du Mali, alors que le sabre a été restitué au Sénégal…
Au fur et à mesure de ses enquêtes, Taina Tervonen démêle ces apparentes contradictions. En particulier elle s’interroge sur la portée historique et symbolique de ce sabre, montrant comment les musées et les objets participent de l’historiographie, montrant aussi comment les discours et les émotions suscités par un objet historique diffèrent selon le côté de l’histoire où l’on se trouve. Au fil des quelques 300 pages de cet ouvrage (et ces 300 pages passent étonnamment vite tant la plume de Taina Tervonen est facile à lire et le propos intéressant), on suit la journaliste dans son enquête pour essayer de démêler cet écheveau. On se promène entre Dakar, Le Havre, Paris, Halwar, Aix-en-Provence… On écoute des héritiers des témoins de cette époque, on compulse des lettres dans les archives…
Et, contrairement à ce que l’on pourrait croire, j’ai eu la sensation que l’histoire devenait de plus en plus complexe au fur et à mesure de ma lecture et de l’enquête de Taina Tervonen. Car il ne faut pas compter sur elle pour livrer à la fin la vérité vraie sur cette histoire, la version définitive. Non, elle livre les faits, les éclaire par des évocations du contexte, les met en perspective, mais elle garde toute la complexité de cette histoire. A la fin, même Archinard devient une figure plus nuancée que ce que l’on aurait pu penser au début.
C’est donc un livre qui oblige le lecteur à réfléchir, à se forger, petit à petit, sa propre opinion des faits, en demeurant autant que possible fidèle aux faits, à leur complexité et parfois même leurs apparentes contradictions.
Les Otages, un titre qui fait référence aux héritiers des chefs de guerre envoyés en France pour les couper de leurs racines et pour éviter qu’ils ne reprennent le flambeau de leurs pères, mais qui peut englober les objets culturels, leurs trajets complexes, leur histoire, ce qu’ils disent et ce qu’on leur fait dire. Un livre qui fait réfléchir aussi, qui permet de creuser une question importante, plus pour certains que pour d’autres semble-t-il, et qui prend des significations différentes selon l’angle où l’on se place pour l’aborder. Encore une fois, j’ai beaucoup aimé ce livre, qui se lit étonnamment facilement. Je n’ai pas fait le tour de la question, mais j’ai beaucoup appris, et, si j’ai pu répondre à quelques questions, je crois que j’ai plus de questions en fermant ce livre qu’en l’ouvrant, et c’est une bonne chose que d’éveiller l’intérêt, la curiosité et d’affûter les esprits, sur ce sujet comme sur d’autres !

<i>Merci aux éditions Marchialy de m’avoir permis de lire ce livre, </i>via<i> netgalley. Deuxième livre venu de cette maison d’édition et deuxième </i>

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