Le Chant de la grenouille

L'histoire est belle. Très belle. Trop belle. Nicolas, architecte charismatique et Clara, infirmière s'aiment. Tout leur sourit et ils mènent une vie rêvée dans une grande maison du pays de Gex. Pourtant, lorsque Clara annonce à sa famille à la fois sa grossesse et son désir d'arrêter de travailler pour élever son enfant, elle fait face à l'incompréhension des siens. Nicolas, travailleur acharné, subit une periode de stress et est pressé de partir, on discutera de tout cela plus tard, ce n'est pas si grave. Et puis arrive cette plainte d'une ancienne secrétaire en burn out, pour harcèlement moral, contre Nicolas. La tension entre les époux va alors monter d'un cran.

Plus que le harcèlement, ce roman aborde la mécanique de l'emprise. Insidieuse, elle rampe tel un serpent. On ne la sent pas, on ne la voit pas, car elle est d'abord la somme de petites choses : une remarque désagréable, un soupir exaspéré, un haussement de sourcils qui va faire douter la victime d'elle-même, puis elle grossit, devient un geste odieux, une insule, jusqu'au drame. Pourquoi la victime ne réagit-elle pas ? Parce qu'elle est une grenouille ! Cette métaphore bien connue illustre à la perfection la situation de la victime, hypnotisée par son bourreau, incapable de voir qu'elle cuit à petit feu, se coupant du monde, prenant même sa défense, jusqu'à en perdre tous ses moyens et son appétit de vivre !

J'ai beaucoup aimé la construction du récit, alternant passé et présent, permettant de comprendre les ressorts psychologiques qui ont conduit Nicolas à ce comportement, ainsi que la gradation des violences, conforme à ce que l'on constate dans la vraie vie. Bien sûr, cela reste une fiction et la réalité, lorsqu'on la connaît, est bien moins fluide, il est beaucoup plus difficile de se faire entendre- et d'être cru !- et l'aide arrive rarement de tous bords ! Cependant, merci à Sandrine Meilland-Rey d'avoir traité ce sujet si important !
Merci également à Netgalley qui m'a permis de découvrir ce livre et cette autrice.